Un corps civique passif, un ensemble sournois et intéressé de sophistiques faiseurs d’opinion et de dirigeants politiques démagogues, un ordre systématiquement trompeur et ravageant les structures politiques, les croyances et les désirs communs : voilà comment Platon dépeint les effets du système éducatif de ses contemporains – par lesquels il entend, de façon très large, les effets de leur système de valeurs et de conduites. Il décrit les cités de son époque comme n’étant rien de plus que des cavernes. Pris au piège à l’intérieur, les gens se battent contre des ombres, jouant des coudes les uns les autres pour obtenir un quelconque avantage ou supériorité, tout en étant constamment et à leur insu prisonniers d’un état illusoire. La lueur de feu artificiel à l’intérieur n’est qu’une frêle et pernicieuse imitation de la lumière du Soleil qui se tient à l’extérieur et au-dessus de chaque caverne donnée.
2En nous cramponnant au confort, à la familiarité de notre mode de vie actuel et à ses infrastructures dépendant des énergies fossiles – bien qu’un consensus grandissant provenant des études scientifiques fournisse des preuves du ravage que cela cause – sommes-nous en train de nous emprisonner nous-mêmes dans la caverne de Platon (Rép. VII, 514 a-517 a) ? Et si jamais nous avions l’audace de sortir de la caverne, qu’en résulterait-il pour l’idée que nous nous faisons de nos cités et de nous-mêmes ? Comment pourrions-nous relever le défi de rendre notre confort et nos compétitions conformes aux exigences irréductibles de la réalité extérieure ?
Extrait, libre de droit de « Platon et le développement durable » Melissa Lan